« Le rôle de l’État est de faire faire et non pas de faire » : entretien avec Charles Millon

Notre pays a besoin de valoriser les missions premières de l’État.

L’ancien ministre, député et maire, Charles Millon, nous livre les fruits de ses réflexions sur l’Etat qui, selon lui, devrait rester focalisé sur ses premières missions et abandonner certaines prérogatives au profit des collectivités territoriales.


Ancien ministre de la Défense sous Jacques Chirac, entre 1995 et 1997, après avoir longtemps exercé comme maire de Belley et comme député de l’Ain, Charles Million possède un parcours politique riche. Fort de cette expérience d’élu local et national, il nous livre sa vision de l’État français et de la politique française. En particulier, il plaide pour un retour au principe de subsidiarité en France ainsi qu’un renforcement de l’ancrage local des élus. 

Causeur. Vous appelez de vos vœux depuis plusieurs années à une réforme profonde de l’État et de la pratique du pouvoir en France. Quelles sont les priorités à remettre en avant ?

Charles Millon. Notre pays a besoin de valoriser les missions premières de l’État : garantir la sécurité de tous, pour permettre à chacun de s’épanouir. Cela implique que l’État ait en charge essentiellement la sécurité intérieure et extérieure et la diplomatie. Lorsque vous étudiez l’histoire, vous constatez que les prérogatives de l’État étaient concentrées autour de ces trois domaines : la diplomatie et les relations avec les autres états ; la défense et la sécurité extérieure ; l’ordre public et la sécurité intérieur.

De quand dateriez-vous donc le début de l’État providence sous la forme que nous connaissons aujourd’hui ?

Les guerres ont toujours permis à l’Etat d’accroître son pouvoir et son rôle. Au XXe siècle, la France et toute l’Europe ont connu deux guerres. Au lendemain de ces deux conflits, l’État a accru ses prérogatives, pour défendre d’abord et reconstruire ensuite le pays, mais sans jamais s’en départir par la suite. Les crises économiques participent aussi à l’augmentation des interventions de l’État. L’exemple le plus connu est la crise de 1929, qui a provoqué l’émergence de l’État-Providence avec l’adoption de l’analyse keynésienne et la relance de la demande par la dépense publique.

Quelles prérogatives pourraient être dévolues aux collectivités territoriales ?

Certains domaines en crise, en particulier la santé et l’hôpital, pourraient parfaitement être gérés par les collectivités locales et des organismes privés. D’une région à une autre, les besoins diffèrent beaucoup en la matière. Prenons aussi l’exemple de l’école : aux États-Unis, la politique de l’éducation est réservée aux États et non pas au gouvernement fédéral, ce qui permet d’instaurer une liberté éducative très importante, qu’il est particulièrement difficile à promouvoir en France. Dans ces deux domaines, l’éducation et la santé, le poids de l’État central serait allégé considérablement si un gouvernement avait le courage de renoncer à cette obsession jacobine, en reconnaissant l’autonomie des hôpitaux et des établissements scolaires et universitaires. Il faut convaincre les Français qu’il y a d’autres modèles que celui que nous connaissons depuis les années 1950. J’ai cité le modèle américain, mais nous pourrions aussi prendre en exemple les Länder en Allemagne, dont les prérogatives sont également considérables, ou la Suisse, qui respecte de manière scrupuleuse le principe de subsidiarité. N’oublions pas que le rôle de l’État est de faire faire et non pas de faire.

La suppression de la taxe d’habitation par le gouvernement d’Élisabeth Borne paraît plutôt aller dans le sens contraire de ce que vous prônez…

Absolument. Cette réforme, dont les visées sont purement électoralistes, appauvrit considérablement les communes et les empêche de disposer librement de ressources qui seront, une fois de plus, concentrées dans les mains de l’État central. Ne parlons même pas des hausses de la taxe foncière, que de nombreuses communes ont déjà commencé à effectuer pour compenser cette suppression de la taxe d’habitation.

Parlons de la situation politique de notre pays. Depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron et son ascension fulgurante, l’on tend à admirer les « parvenus » ceux qui se sont passés des carrières politiques traditionnelles pour se faire élire directement. Était-ce si positif en fin de compte ?

L’absence d’ancrage territorial des élus est une grande erreur. Dans ma carrière, comme bon nombre de mes pairs d’ailleurs, j’ai débuté dans ma commune de Belley, dans l’Ain, où j’ai été maire pendant presque vingt-quatre ans, avant de devenir député, en 1978. C’est dans mon mandat local que j’ai appris à comprendre ce qu’un Français vit au quotidien et quelles sont ses préoccupations. Le risque avec cette nouvelle sorte d’élus, qui n’ont pas d’expérience politique au niveau local, est de tomber facilement dans une approche technocratique du pouvoir, où les solutions sont détachées des réalités concrètes. C’est d’ailleurs ce qu’ont ressenti les Gilets jaunes en 2019 dans les réformes menées par Emmanuel Macron, avec l’augmentation de la taxe sur les carburants notamment. Ils avaient le sentiment que le gouvernement ne comprenait pas leur situation.

Nous observons depuis une dizaine d’années un éclatement des partis politiques traditionnels et la montée de tendances plus radicales, aussi bien à gauche qu’à droite, qui ne parviennent pas pour autant à fédérer largement. À qui la faute ?

Il est toujours difficile de mettre le doigt sur une cause unique pour expliquer la situation politique actuelle. Pour autant, une réforme de notre système électoral pourrait faciliter la revitalisation de nos structures politiques et les rendre capables de fédérer le plus grand nombre de tendances idéologiques. En établissant par exemple, pour les élections législatives, un mode de scrutin uninominal à un tour, comme en Grande Bretagne, les partis seraient obligés de se regrouper pour gagner l’élection. Cela permettrait qu’une majorité se dégage. De plus, ces partis auraient la responsabilité de traiter en leur sein la question des extrêmes et ainsi le pouvoir en place ne pourrait plus se servir de ces extrêmes comme épouvantail pour se maintenir artificiellement au pouvoir.

La proportionnelle ne m’apparaît certainement pas la solution, parce qu’elle provoque au contraire des divisions accrues. C’est d’ailleurs celles-ci qui ont fait chuter la IVe République.

Ne confondons pas engagement politique et engagement partisan.

Vous prônez un engagement renouvelé des jeunes en politique aujourd’hui. Quel message leur adressez-vous plus précisément ?

L’engagement politique est essentiel car c’est à travers lui que l’on participe à la vie de la cité, à la définition des équipements nécessaires à la vie commune, à la création des conditions favorables à l’épanouissement de chacun. Ne confondons pas engagement politique et engagement partisan.

L’engagement politique est plus large ; il inclut la vie associative, l’animation culturelle, le système éducatif, la politique sanitaire… Par l’engagement politique, le citoyen participe à la définition du cadre dans lequel les individus pourront prendre des initiatives au service de la collectivité. C’est pourquoi je souhaite que nombreux soient les jeunes qui s’investissent au service des autres.

Causeur 27/12/2023




Charles Millon : « J’appelle Le Pen, Zemmour et Pécresse à construire un programme commun »

L’ex-ministre a un plan : enjamber la présidentielle et construire « l’union de la droite » aux législatives, pour pousser Emmanuel Macron à la cohabitation. Un voeu pieux ?

Les politiques ont l’art de voir dans les situations les plus désespérées des opportunités. Charles Millon, ministre de la Défense de Jacques Chirac entre 1995 et 1997, n’a plus de mandat depuis vingt ans mais il a toujours le virus. Et le septuagénaire a une idée pour « redonner de l’espoir » à l’électorat de la droite : ignorer la défaite probable à la présidentielle… et tout miser sur les élections législatives qui auront lieu, sauf dissolution de dernière minute, les 12 et 19 juin 2022.  

Sur le papier, le « plan Millon » est implacable : Marine Le Pen, Eric Zemmour et Valérie Pécresse élaborent un programme commun « dans les trois semaines qui viennent », se répartissent les circonscriptions et font mordre la poussière à Emmanuel Macron, dont les députés, pense-t-il, manquent d’implantation. Ainsi, même réélu, le président serait acculé à la cohabitation. Les idées de droite gouverneraient à nouveau.

Quand on lui rappelle que Valérie Pécresse a exclu plusieurs fois et sans la moindre ambiguïté cette hypothèse, Charles Millon ne se démonte pas. Il en appelle immédiatement à Bruno Retailleau, François-Xavier Bellamy et Eric Ciotti, qu’il estime plus sensibles à « l’union de la droite » qu’il veut monter. L’ancien ministre, qui reste en contact à la fois avec Eric Zemmour et avec Marine Le Pen, se propose de jouer les entremetteurs entre ces droites qui ne se parlent pas ou plus. Ou alors « la droite n’est pas prête de revenir au pouvoir », prophétise-t-il. 

L’Express : En fin d’année 2021, on vous a annoncé proche d’Eric Zemmour. Qu’en est-il aujourd’hui ?  

Charles Millon : Je soutiens l’union de la droite. Nous sommes face à une situation inédite et paradoxale : les Français n’ont jamais été autant à droite et pourtant nous pourrions perdre l’élection présidentielle. J’appelle donc Eric Zemmour, Marine Le Pen et Valérie Pécresse à se parler avant le premier tour, afin d’élaborer un programme commun en vue des élections législatives….

Article réservé aux abonnés, la suite sur l’Express

Propos recueillis par Étienne Girard
Publié le 21/03/2022 à 17:24
 

 

 

 

 




Charles Millon: « La politique étrangère d’Emmanuel Macron est illisible »

Mondafrique. Comment expliquez vous l’échec de l’intervention française au Mali ?

Charles Millon. Pour comprendre la situation actuelle, il faut revenir à la double erreur historique qui a été commise par tous les gouvernements maliens. La première est d’avoir toujours refusé de prendre réellement en compte les problèmes des minorités, qu’il s’agisse des peuls ou des touaregs.

Amadou Toumani Touré, dit ATT, le président malien entre 2002 et 2012 que j’ai bien connu et toujours apprécié avait l’obsession d’un État unitaire. Sur ce sujet, il était têtu comme une mule. . Pas question pour le pouvoir à Bamako d’envisager la moindre autonomie régionale, alors que le Nord Mali couvre une surface égale aux deux tiers du pays.

La seconde erreur aura été la cécité de la classe politique malienne à prendre en compte la terrible conjonction entre les djihadistes et les trafiquants qui transportaient la drogue à travers le Mali depuis la Guinée Bissau jusqu’au Niger ou au Burkina. Il y a eu une sorte d’alliance objective entre les mouvements irrédentistes et les groupes armés. Hélas, le pouvoir malien a toujours fermé les yeux sur ces multiples trafics qui ont financé le terrorisme

Mondafrique. La France a-t-elle commis des erreurs graves d’appréciation durant ces neuf années de présence au Mali?

Charles Millon. La première erreur dramatique aura été la guerre que Nicolas Sarkozy a mené en Libye. Lors de la chute de Khadafi, les touaregs qui avaient été enrôlés dans l’armée libyenne ont rejoint, lourdement armés, leur pays d’origine. Ils ont constitué, surtout dans le Nord du Mali, le noyau dur des groupes djihadistes.

Autre dommage collatéral, la fin brutale du régime libyen a permis Vladimir Poutine de remettre les pieds en Afrique.   La Russie possède aujourd’hui des champs de pétrole importants en Libye !

Ce n’est pas la seule erreur française. Si notre armée a eu raison d’intervenir pour éteindre l’incendie djihadiste, elle aurait du agir en pompier et très vite préparer sa sortie. En restant sur place, les soldats français qui avaient été accueillis en 2013 comme des libérateurs, ont été perçus neuf ans plus tard comme une armée d’occupation. Nos militaires ont été des boucs émissaires commodes pour des armées locales qui décampaient face aux groupes armés tandis que nos soldats étaient tués. C’est un peu comme ce qui s’est passé en Afghanistan pour les Américains. . .

Certains patrons de l’armée française réfléchissent d’ailleurs à de nouveaux modes d’intervention via des forces de réaction rapides et aéroportées qui ne s’enliseraient pas sur place. Les bases militaires, on l’a vu, deviennent des cibles pour les terroristes..

Mondafrique. On entend souvent qu’en Libye comme au Mali la France a privilégié la seule logique militaire. Est ce qu’il aurait fallu intervenir plus vigoureusement dans la vie politique malienne et imposer une gouvernance plus conforme à nos propres valeurs?

Charles Millon. Le temps de l’immixtion dans la politique intérieure des États africains est dépassé. En revanche il aurait fallu lancer, dans la foulée de l’opération militaire, des projets de développement confiés, dans le cadre d’une aide liée, à des entreprises françaises. Les populations locales doivent réaliser que les hôpitaux et les lycées construits au Mali et au Sahel sont financés par la France. C’est ainsi que l’influence française auprès de nos amis africains renaîtra dans des jours meilleurs.

Mondafrique. Le président ivoirien Ouattara a déclaré jeudi matin sur RFI et France 24 qu’il demandait « à ses frères maliens de faire un effort, de rentrer dans les rangs ». Est ce que vous lui donnez raison ?

Charles Millon Il faudrait rappeler à Monsieur Ouattara qui remet en cause la légitimité de la junte militaire à Bamako qu’il bénéficie d’un troisième mandat illégitime et non constitutionnel. Qu’il nettoie devant sa porte avant de donner des conseils aux autres.

Mondafrique. Que pensez vous de la politique étrangère d’Emmanuel Macron et de Jean Yves Le Drian, son ministre des Affaires Etrangères ?

Charles Millon. Le Drian est surtout médiocre et il n’a pas l’air de s’intéresser aux Africains et à l’Afrique. Sans doute n’est-il pas facile de travailler avec un Emmanuel Macron qui veut toujours prendre la lumière.

Ce que je reproche au Président français au Mali comme au Liban ou en Ukraine, c’est de faire une politique de coups, sans suivi, ni constance. Cette fâcheuse habitude est totalement contre productive. La diplomatie se joue dans la durée et dans des liens de confiance avec nos interlocuteurs étrangers. C’est long, très long.

La politique d’Emmanuel Macron et de Jean Yves Le Drian est finalement illisible. Comment en même temps, selon l’expression consacrée du président français, dénoncer les coups d’état en Guinée ou au Mali et apporter un soutien total au fils du président Déby qui prend le pouvoir par la force après le décès brutal de son père ?

Emmanuel Macon a des réactions d’adolescent. Ce n’est pas ainsi qu’on doit construire la politique étrangère d’un pays comme la France.

By Nicolas Beau -17 février 2022

MONDAFRIQUE




Présidentielle 2022 : Barnier trop « lisse », « en phase » avec Zemmour, Charles Millon distribue ses bons points à droite

Interviewé ce samedi par l’Express, l’ancien président de la Région Rhône-Alpes devait notamment analyser le parcours d’Eric Zemmour afin de déterminer si l’essayiste n’est pas finalement son digne successeur en tentant de rassembler derrière lui des électeurs des Républicains et du Rassemblement national.

« Eric Zemmour répond à un besoin : celui de l’expression d’un certain nombre de jugements et d’analyses qui correspondent à la réalité. Quand il dit que la France doit rester une communauté nationale avec les mêmes idéaux et convictions, il a raison. Il est contre une société communautarisée, moi aussi. Je suis en phase avec le point central du discours d’Eric Zemmour », indique Charles Millon.

Il considère également que « Zemmour profite de ce que Fillon a commencé » en 2017, précédent scrutin présidentiel durant lequel Charles Millon avait soutenu l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy.

Quid des Républicains qui organiseront bientôt leur congrès afin de choisir leur candidat ? Charles Millon en veut encore aux dirigeants d’avoir évincé Laurent Wauquiez et sa tentative de droitiser fortement le parti : « Je ne comprends pas leur renoncement. C’était leur heure, surtout celle de Wauquiez. (…) Mais ces idées sont devenues centrales à droite ! En conséquence, Éric Ciotti préempte cette ligne politique. Il n’a pas le même statut que les trois favoris, mais son discours parle à la droite ».

A choisir, on devine que Charles Millon est plutôt attiré par les profils d’Eric Zemmour et d’Eric Ciotti. Et pas du savoyard Michel Barnier ? « Il est tellement lisse. Il a opéré un revirement récent sur l’immigration et l’Europe. Ce n’est pas crédible. Il a été au coeur des institutions européennes pendant dix ans. Cette politique est aujourd’hui contestée par les électeurs, y compris par les autres candidats de droite. Sans juger de sa sincérité, on ne peut pas être un personnage multiple ».

Lyon Mag du 13/11/2021




Podcast. Quelle défense pour la France ? C. Millon, G. Longuet

Podcast. Développement de la haute intensité, confrontation avec la Chine, renouvellement du matériel militaire, quelle peut-être la défense de demain pour la France ? Entretien avec deux anciens ministres de la Défense, Charles Millon et Gérard Longuet.

Émission présentée par Jean-Baptiste Noé et Hadrien Desuin.




Charles Millon : Les communes peuvent être de véritables laboratoires pour une politique au service du bien commun

Charles Millon est bien connu des lecteurs du Salon Beige pour son engagement politique. Député mais aussi ministre de la Défense dans deux gouvernements d’Alain Juppé de mai 1995 à juin 1997, il a été élu Président du Conseil régional de Rhône-Alpes et maire pendant vingt-quatre ans de la ville de Belley.

Fondateur du réseau de l’Avant-Garde, il est à l’origine d’une formation pour les candidats aux municipales.

Il a répondu aux questions du Salon Beige. 

Monsieur le Ministre, pourquoi pensez-vous qu’il faille s’investir dans ces élections qui auront lieu en 2020 ?

Avec l’élection d’Emmanuel Macron, notre pays a signé pour cinq nouvelles années de déconstruction. La situation peut sembler sans issue mais à l’échelle locale, il est possible de reconstruire des communautés de destin, comme Gustave Thibon les définissait. Si à l’échelle nationale, nos élites politiques ne partagent plus matériellement ni spirituellement une existence commune, le maire, lui, est soumis aux mêmes risques et poursuit les mêmes buts que ses électeurs. Il vit dans une sorte de coude à coude quotidien avec eux. Les communes peuvent être donc de véritables laboratoires pour mettre en place une politique au service du bien commun.

Les élections de 2020 sont une très belle opportunité pour permettre à une nouvelle génération politique de s’emparer des rênes de plusieurs dizaines de communes, d’acquérir ainsi, une expérience et une légitimité politiques pour, pourquoi pas, un jour prendre les rênes de notre pays !

Cet été, l’opinion publique a été alertée par le nombre important de maires qui préfèrent démissionner. Cette situation ne révèle-t-elle pas les difficultés croissantes d’un tel mandat ?

Il est vrai que, depuis l’élection d’Emmanuel Macron, 386 maires ont démissionné. C’est un chiffre record dont la tendance depuis 2014 ne cesse de s’accélérer. Une des raisons principales de cette situation est le sentiment des élus locaux d’être méprisés par l’Etat. Il faut aussi ajouter la contribution croissante des finances locales aux politiques publiques nationales et plus récemment la loi NOTRE, portant sur la nouvelle organisation territoriale.

Il est vrai que la responsabilité des maires est devenue plus difficile ces dernières années mais cela ne doit pas faire oublier que le maire est un homme aux quarante métiers, soit autant de possibilités d’agir pour améliorer la vie de ses concitoyens. Je pense à ce jeune élu, Philibert Marquis, conseiller municipal dans la ville Belley, que j’ai administrée pendant plus de vingt ans, je pense à son enthousiasme. Architecte, il a mis ses compétences au service de sa ville : actuellement, il réfléchit à la reconversion des bâtiments de l’ancien hôpital.

Mais être maire ou même simplement conseiller municipal demande certaines compétences. Tout le monde ne semble pas fait pour assumer cette responsabilité.

Je ne suis pas du tout d’accord. Chacun d’entre nous doit être acteur de la reconstruction de notre pays et la bataille municipale doit concerner tout le monde. Habiter un territoire, ce n’est pas simplement y vivre, c’est aussi contribuer à son développement, à sa vie sociale… Si nous sommes mus par la volonté que le bien commun régisse la France, alors nous avons le devoir de nous mobiliser pour ces élections.

Regardez, en 2014, une toute petite poignée d’anciens militants de La Manif Pour Tous a été élue aux fonctions municipales. Ces militants n’étaient pas d’anciens piliers de la vie politique, ils ne dépendaient pas des systèmes d’allégeance des partis politiques. Pourtant, ils ont, à ce jour, un bilan peu connu mais incroyable. L’une a mis en place des patronages laïcs dans sa ville, tandis que l’autre a travaillé à la mise en place d’une préparation au mariage civil. Un autre exemple est celui de Robert Ménard qui a instauré une mutuelle municipale dans sa ville de Béziers, la quatrième ville la plus pauvre de France ! Croyez-vous qu’il était un spécialiste de l’assurance maladie ? Le travail de ces quelques élus montre qu’à l’échelle locale, il n’est pas nécessaire d’être un expert dans tel ou tel secteur pour réaliser des actions publiques utiles.

Avec l’Avant-Garde, vous organisez une formation pour les candidats aux municipales. N’est-ce pas contradictoire ?

Ce n’est pas parce qu’il n’est pas nécessaire d’être un expert qu’il ne faut pas se préparer. Mener une campagne et la gagner demandent d’être assuré dans ses convictions, dans ses fondements anthropologiques pour porter un programme qui soit cohérent. Les candidats doivent aussi acquérir des techniques indispensables comme apprendre à parler en public, constituer son équipe, user des médias, des réseaux sociaux… On ne peut s’improviser dans une campagne électorale : il y a une temporalité à respecter et une réflexion stratégique à avoir. L’objectif de notre formation est donc d’accompagner les candidats, les membres de leur liste et les membre de leur équipe de campagne sur toute cette démarche afin qu’ils soient des candidats crédibles. Mais s’engager dans la bataille des municipales ne s’arrête pas au soir des élections. Une fois élu, il faut pouvoir administrer, mettre en place ce qui a été énoncé. L’autre objectif de cette formation est donc de préparer les candidats à leurs responsabilités.

Concrètement, comment se déroulera cette formation ?

La formation se déroulera sur six week-ends d’octobre 2018 à septembre 2019, du samedi matin au dimanche milieu d’après-midi, afin de faciliter le retour des participants venus de province. C’est une formation qui s’adresse à tous tant que les participants partagent notre vision du bien commun, une vision fondée sur la pensée personnaliste. La question des étiquettes politiques ne nous intéresse pas. D’ailleurs, c’est un problème mineur pour les élections municipales. En effet, à l’exception des très grandes villes, chaque commune a son équilibre politique propre, loin des équilibres nationaux.

Nous avons réuni une trentaine d’intervenants : des élus, des journalistes, des politologues, des experts des collectivités territoriales… pour une formation à l’ensemble de enjeux : la construction d’un projet pour sa commune, la préparation de la campagne et la gestion de la commune.

Pour toute information, les lecteurs du Salon Beige peuvent prendre contact avec France Andrieux : france.andrieux@lavant-garde.fr

Quel serait le conseil principal que vous adresseriez à un lecteur du Salon Beige qui serait tenté par l’engagement électoral dans sa commune ?

Si vous vous souhaitez devenir maire ou conseiller municipal, c’est parce que vous avez le désir d’être au service des habitants de votre territoire. Il est fini le temps où l’ambition politique suffisait à justifier un mandat électoral. Aujourd’hui, les Français ont besoin de cohérence et d’engagement. La priorité est donc que vos lecteurs acquièrent une légitimité en se mettant dès aujourd’hui au service de leurs concitoyens. Il faut qu’ils se rendent utiles, qu’ils se retroussent les manches et agissent dans les lieux où les habitants se sentent négligés, abandonnés. En 2020, les Français n’éliront que les candidats qui auront su être crédibles par des actions menées pour la population et non pour leur notoriété personnelle.

Calendrier de la formation :

  • 20-21 octobre 2018 : La commune, un territoire d’action politique
  • 1er-2 décembre 2018 : La commune, des électeurs à convaincre et mobiliser
  • 26-27 janvier 2019 : La commune, une collectivité territoriale à administrer
  • 30-31 mars 2019 : La commune, une communauté à construire et préserver
  • 15-16 juin : 2019 : La commune, un territoire à faire aimer
  • Septembre : 2019 : Bilan de la formation : initiatives et témoignages d’élus.

https://www.lesalonbeige.fr/charles-millon-les-communes-peuvent-etre-de-veritables-laboratoires-pour-une-politique-au-service-du-bien-commun/

 




Europe : les leçons de l’Italie

Après une semaine de crise, le gouvernement d’alliance entre la Ligue du nord et le Mouvement 5 étoiles (MSS) a finalement été nommé le 1er juin, avec à sa tête Giuseppe Conte.
Pendant plusieurs jours, qui succédaient déjà à des semaines de tractation, le président de la république italienne Sergio Mattarella a refusé d’approuver la nomination de l’ économiste Paolo Savona, hostile à la monnaie unique, au poste de ministre de l’ économie.
La crise s’est dénoué quand la Ligue et le MSS ont accepté de présenter l’économiste Giovanni Tria à ce poste. Mais ces quelques jours, à n’en pas douter, auront encore un peu plus creuser l’écart entre le peuple italien et l’Europe.
Ce n’est certes pas la première fois que des élections nationales heurtent le cours du « fleuve tranquille » européen, et que le second prime finalement sur le résultat des premières : il suffit de se souvenir des référendums danois en 2000, irlandais en 2001 et 2008, néerlandais et français de 2005.
Dans chacun de ces cas, on trouva des arrangements institutionnels ou juridiques pour contourner la réticence des peuples.
Mais, avec le coup d’éclat du 27 mai du président de la république refusant la nomination de Paolo Savona et demandant à Carlo Cottarelli, figure indépendante et ancien du FMI de former un gouvernement, on a atteint un nouveau palier.
En effet, alors qu’au Danemark, aux Pays-Bas ou en France , seuls un ou deux des ingrédients de la crise démocratique qui frappent nos pays européens étaient identifiables, dans le cas italien, ils sont tous réunis : angoisse identitaire face aux flux migratoires massifs; inquiétudes sociales devant un modèle économique qui ne crée plus de richesses et les redistribue encore moins; rejet massif des élites politiques qui, malgré les alternances, se partagent le pouvoir depuis trois ou quatre décennies ; déni démocratique de ces élites de plus en plus décrédibilisées.
C’est ce carré magique de la défiance qu’il faut analyser pour saisir l’enjeu de ce qui se passe actuellement en Italie.

L’angoisse face aux flux migratoires

C’est peu dire que l’Italie a été aux avant-postes de la crise migratoire qu’a connu l’Europe ces dernières années.
Depuis 2014, elle a accueilli plus de 600 000 migrants, dont une majorité d’Africains. Certes, avec les accords signés avec les pays de transit (en particulier la Libye), le chiffre des entrées a commencé à décroître en 2017 (avec 119 000 nouveaux migrants contre 180 000 l’année précédente).
Mais la pression reste importante. Conséquence : la question migratoire qui ne préoccupait que 4% des Italiens en 2013 en inquiète 33% aujourd’hui (Eurobaromètre, novembre 2017).
Face à cette « ruée vers l’Europe » (titre du best-seller du journaliste français Stephen Smith paru en février 2018), les Italiens se sont sentis bien seuls et il est vrai que leurs partenaires n’ont pas fait preuve de beaucoup de solidarité.
Mais si les États-membres ont fait preuve d’égoïsme, il est également vrai que l’Union européenne n’a pas fait montre d’une grande volonté é de stopper les flux.
En 2016, Jean-Claude Junker invitait les peuples européens à « être plus accueillants ».
Le 27 mai dernier, il prévenait que la Commission veillerait « à la sauvegarde des droits des Africains en Italie ».
De telles déclarations ne peuvent que créer ressentiments et colères parmi les peuples européens.
Comme les autres habitants du continent, « les Italiens ne veulent pas être pauvres et étrangers dans leur pays », a averti l’ancien Premier ministre français Dominique de Villepin.

La peur du déclassement économique

Si la question migratoire a lourdement pesé dans les élections italiennes, c’est sur la question de l’euro que le bras de fer s’est engagé entre le président de la république et la Ligue du nord et le MSS, sortis vainqueurs des élections du 4 mars.
En arrière-plan, c’est toute la politique que ses adversaires appellent « de Bruxelles », « d’austérité », « néolibérale» ou de« l’Europe allemande » qui est en jeu.
Son rejet constituait le principal point de convergence de la Ligue du nord et le M5S.
Sans pour autant accorder un trop grand crédit aux propositions économiques de ces deux formations, il est permis de constater, dix ans après le collapse de 2008, que les politiques menées depuis sur le continent n’ont pas permis de ramener la croissance, l’emploi ni la prospérité.
De fait, 23% des Italiens risquent aujourd’hui de passer sous le seuil de pauvreté, une hausse de 3,5% en deux ans malgré le retour timide de la croissance (étude Bankltalia, mars 2018).
Retraités, étudiants, classe moyenne : comme ailleurs en Europe, le déclassement et la précarisation sont l’horizon de millions d’italiens.
La popularité de la proposition phare du M5S visant à créer un revenu citoyen (780 euros par mois) ne s’explique pas autrement. Et l’Union européenne est mise au banc des accusés – ainsi que Berlin.

Le rejet massif des élites politiques traditionnelles

Mais elle n’y est pas mise seule avec, troisième côté du carré magique de la défiance, le rejet massif des élites politiques traditionnelles.
En France, avec la quasi-disparition du Parti socialiste et l’effondrement de la droite à l’occasion de l’élection d’Emmanuel Macron, on a appelé ce mouvement le « dégagisme » : un coup de balais massif et brutal des responsables politiques qui gouvernaient le pays depuis des décennies (du moins en apparence…).
Partout en Europe, des partis nouveaux, que leurs adversaires qualifient de « populistes », émergent, sont aux portes du pouvoir ou l’exercent déjà. En Allemagne, avec 12,6% des voix, l’AfD a fait une entrée fracassante au Bundestag l’an passé.
En Italie, pays d’arrangements parlementaires et de combinazione entre partis, l’aspiration au changement était immense.
Malgré sa jeunesse et son énergie, Matteo Renzi, président du Conseil entre 2014 et 2016, n’avait pas réussi à faire oublier qu’il avait entamé sa carrière sous le parrainage du vieux Romano Prodi.
Silvio Berlusconi, trois fois président du Conseil, a 81 ans.
Et le terne Paolo Gentiloni gouvernait le pays depuis dix-huit mois à la tête d’un gouvernement de techniciens identifiés au « système » dont les gens ne veulent plus.
Matteo Salvini, patron de la Ligue du nord et nouveau ministre de l’intérieur, a 45 ans et Luigi Di Maio, tête d’affiche du M5S et désormais ministre du Développement économique, du Travail et des Politiques sociales, 31 ans.
Aussi incertaine qu’apparaisse leur alliance, le vent frais qu’ils font souffler sur la politique séduit un nombre croissant d’italiens.

Le déni démocratique de ces élites

Et cette séduction fonctionne d’autant mieux que les élites traditionnelles, largement décrédibilisées, osent des manœuvres qui entrent en contradiction flagrante avec le suffrage des citoyens.
En France en 2007, le vote par le Parlement du traité de Lisbonne, texte quasi-identique au traité constitutionnel rejeté par référendum deux ans auparavant, constitue assurément un « cancer » politique qui se prolonge et métastase.
En Italie, le coup de force du président Sergio Mattarella, vieux routier de la démocratie-chrétienne, quatre fois ministres ces trente dernières années, cherchant à faire nommer un président du Conseil dont les options diffèrent radicalement de ce qu’ont exprimé les urnes en mars dernier, s’apparente à ce déni.
Or, c’est donner de solides raisons aux citoyens de rompre définitivement avec l’élite qui ne l’écoute plus.
Quant au surplus un commissaire européen, l’Allemand Günther Oettinger en l’occurrence, se permet de déclarer que « les marchés vont apprendre aux Italiens à bien voter», il ne faut pas s’en étonner.
Charles Millon, ancien ministre de la Défense
Fondateur de l’Institut Thomas More (www.institut-thomas-more.org)
http://www.charlesmillon.org



Démographie française | L’urgence d’une politique familiale

L’INSEE vient de publier les dernières données démographiques disponibles sur la France : elles sont pour le moins préoccupantes. La tendance baissière, amorcée depuis 2012, se confirme pour les trois dernières années 2015, 2016 et 2017. Notre pays est passé d’une moyenne de 2 enfants par femme en 2012 à 1,88 en 2017, nous écartant ainsi chaque année un peu plus des 2,1 enfants requis pour satisfaire le renouvellement des générations.

Depuis des décennies, nous sommes un certain nombre à prôner une véritable politique familiale, à demander aux pouvoirs publics de promouvoir des mesures dans des domaines aussi divers que le logement, l’école, les modes de gardes, le travail des femmes, etc., à souhaiter que l’on ne revienne pas sur l’universalité des allocations familiales.

En vain.

Nous étions traité de conservateurs invétérés pour le moins et, pour le pire, de réactionnaires nostalgiques de la femme au foyer ! Pourtant des démographes des plus sérieux, des responsables politiques ou sociaux, des sociologues avisés, tiraient le signal d’alarme en soulignant qu’une nation qui voyait sa natalité baisser est une nation qui, non seulement ne pourrait plus garantir la solidarité nationale entre les générations mais, pire, ne pourrait porter un élan de dynamisme, de croissance et d’espoir.

Nous avons dénoncé la politique familiale de François Hollande qui avait abaissé le plafond du quotient familial, divisé par deux ou par quatre les allocations familiales pour les ménages considérés comme aisés, introduit des critères de sélection sévères pour les prestations d’accueil des jeunes enfants.

Malheureusement Emmanuel Macron a poursuivi cette politique notamment avec un abaissement des plafonds de ressources donnant droit au versement de l’allocation de base pour les parents de jeunes enfants. De plus, les collectivités locales ont toutes les peines du monde à développer l’accueil des jeunes enfants, à cause de la baisse de leurs dotations.

Aujourd’hui nous appelons les responsables politiques à mesurer les conséquences qu’une baisse de la natalité pourrait avoir tant sur la vigueur économique que sur la solidarité nationale. Nous leur demandons aussi de réfléchir à la mission essentielle qu’assument les familles pour la transmission, l’éducation, la solidarité entre les générations. C’est à eux de tout mettre en œuvre pour pérenniser l’exception démographique française.

N’oublions pas que les jeunes sans famille sont majoritairement ceux que l’on retrouve parmi les déscolarisés, les marginalisés sans emploi. N’oublions pas que ce sont les familles qui sont souvent le dernier refuge de ceux qui ont été blessés par la vie et qui cherchent bien souvent une aide, mais aussi un lieu d’affection et de soutien moral.

 

Charles Millon

Ancien Ministre de la Défense




UNE ILE QUI ETONNERA L’EUROPE

Le tandem Talamoni-Simeoni a gagné. Et la France avec.

Sous sa houlette, les Corses vont tenter de démontrer sans hargne, avec calme et détermination, qu’autonomie régionale et République peuvent rimer ; qu’il est possible de tester des expériences sans pour autant tout détruire et qui plus est, si ces expériences s’avéraient positives, elles pourraient être étendues à d’autres.

Qu’un territoire à l’identité si puissante puisse se ré approprier la gestion de sa culture, de son urbanisme ou de ses infrastructures est sain et permettra peut-être à notre Etat centralisateur de renoncer enfin à son attitude tutélaire , pour adopter une attitude contractuelle à l’heure où la mondialisation impose des structures plus souples et moins pesantes, pour aller de l’avant.
Cette France des autonomies à laquelle les Corses viennent d’ouvrir la porte pourrait signifier que le pays sort de l’adolescence ; qu’il est en route vers l’âge adulte ; qu’enfin il prêt à garantir une société de confiance.

Une route qu’avait déjà souhaité ouvrir, en 1969, le général de Gaulle avec son referendum sur la régionalisation. On connaît la suite : le dégagisme soixante-huitard ambiant a balayé et le vieil homme, et ses idées neuves.

Le témoin était repris par Gaston Deferre en 1981, tout juste nommé Ministre de l’Intérieur, qui dira de ses lois de décentralisation qu’elles accompagnaient un mouvement « irréversible ».

Plus tard, Michel Rocard enfoncera le coin en signant les accords de Nouméa dont nous verrons l’année prochaine qu’ils pourraient bien aboutir aussi à l’autonomie de la Nouvelle Calédonie.

Ce processus engagé il y a 50 ans va enfin porter ces fruits et notre système centralisateur parisianiste et étatique craqueler un peu plus…
Que ce coup porté émane de la Corse a quelque chose de savoureux :
De la Corse les Continentaux, au fond, aujourd’hui, ne connaissent plus grand chose.
Prosper Mérimée et sa Vendetta de Colomba, Astérix et ses flemmards ramasseurs de châtaignes ou Charles Pasqua et ses réseaux border line qui faisaient flirter politique et banditisme, ont fini par forger dans le subconscient national, l’image d’une Corse vengeresse, paresseuse et mafieuse…

Seul Bonaparte échappe à la règle et pour cause : son île était par trop petite pour assouvir son ambition démesurée et son encombrante famille y était, pour tout dire, presque persona non grata.…
Même plus, il est encensé.

Pourquoi, peut-être parce qu’il a participé à renforcer cette France monolithique et pyramidale tant prisée de l’iconographie républicaine !

Ainsi, on a oublié qu’au XVIIIè siècle la Corse était un modèle pour la France d’abord et pour l’Europe ensuite.
Que sa Constitution pensée, écrite, appliquée par Pasquale Paoli et qui a valu jusqu’en 1769 est plus ancienne que celle des Etats Unis d’Amérique, dont les pères fondateurs se sont largement inspirés.

Que les philosophes des lumières si prisés de la bien pensance citaient l’île comme la forme la plus aboutie de démocratie.

Jean-Jacques Rousseau écrivait « La valeur et l’insistance avec laquelle ce peuple a pu recouvrer et défendre sa liberté, mériterait bien que quelque homme sage lui apprit à la conserver.
J’ai le pressentiment qu’un jour cette île étonnera l’Europe »
Et si, pour une fois, il disait vrai ?
Charles Millon
Ancien Ministre de la Défense



Renforcer la francophonie, c’est accroître le rayonnement de la France et la paix dans le monde

La Francophonie doit retrouver toute sa place dans la politique étrangère de la France.

II s’agit d’une politique certes culturelle mais aussi économique.  Le partage de cette belle langue française, enrichie des apports de tous ceux qui l’utilisent de par le monde a créé une profonde communauté de destin parfois mal comprise ou dévoyée.

II y a aujourd’hui en Afrique une forte solidarité et une grande coopération entre les pays parlant le français, et cette relation privilégiée existe aussi entre tous ces partenaires et Ia France.

C’est dans le cadre de Ia Francophonie que la France doit mener une vraie politique de reconquête dans les systèmes éducatifs et la recherche, en étroite liaison avec ses partenaires francophones.

L’Afrique sera demain la plus vaste zone de croissance et d’innovation du monde.

La France se doit donc d’impulser un renouveau de la francophonie, en facilitant par exemple l’uniformisation du droit commercial des pays francophones pour faciliter les échanges entre les entreprises françaises et les entreprises de nos partenaires francophones.

La France doit de manière efficace mettre en place un vaste programme de formations en langue française à destination des jeunes africains en fonction des besoins de chaque pays et plus particulièrement dans les métiers essentiels de I ‘artisanat et du bâtiment qui ont besoin d’une main d’œuvre qualifiée qui leur fait souvent défaut.

Il faut aussi favoriser les accords universitaires, appuyer l’édition scolaire et particulièrement Ia publication de manuels numériques.

Les grandes écoles et universités françaises doivent être aidées pour s‘implanter en Afrique ou la demande de formations francophone de qualité est exponentielle.

La France dispose d’une longue tradition de l’Etat et de la décentralisation.

Elle doit utiliser cette compétence au profit de ses partenaires africains qui le souhaitent dans le cadre d’un renforcement des capacités de Ia coopération décentralisée.

La Francophonie participe au rayonnement de la France à l’étranger, mais la France est souvent plus frileuse que ses partenaires dans ce domaine.

II faut y remédier dans les plus brefs délais avec Ia création par exemple d’un Ministère d’Etat en charge de la Francophonie, du Développement international et des Relations avec l’Afrique.

Un plus grand rôle à la Francophonie parlementaire est également nécessaire afin d’améliorer les relations entre les Etats qui ont le français en partage ; cela participe au renforcement des capacités de l’Etat de droit dans les pays partenaires.

II ne s’agit pas d’un combat d’arrière-garde, mais bien au contraire d’un combat moderne pour conserver la variété du monde, sa richesse, et protéger les cultures diverses contre une uniformisation mondialiste appauvrissante.

Pour mener ces politiques, il est nécessaire de :

  • Favoriser un projet d’uniformisation du droit commercial pour accroitre les échanges et la stabilité.
    (Renforcer le partenariat avec l’OHADA et les Communautés régionales (CEDEAO, CEMAC, UEMOA…)
  • Aider les autorités en charge de la gestion foncière dans les pays francophones
    au travers de coopérations décentralisées renforcées pour l’établissement de cadastres, et la formation de géomètres.
  • Créer un Ministère d’Etat en charge de la Francophonie, du Développement international et des Relations avec I ‘Afrique
  • Lancer des programmes de formations des jeunes africains francophones pour lutter contre le chômage et la pauvreté
  • Renforcer les moyens de la Francophonie parlementaire pour améliorer les capacités de l’état de droit

La francophonie n’est pas un héritage encombrant et honteux comme les chantres de la repentance permanente voudraient le faire croire.

La francophonie représente une force et une solidarité pour tous les pays francophones mais également une richesse et une chance pour l’équilibre du monde.