Charles Millon : Comment l’Europe va t’elle assumer sa future défense ?
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Charles Millon : Comment l’Europe va t’elle assumer sa future défense ?
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Après le Brexit, quelle Europe ?
Brexit, causes et conséquences
De ce « Brexit » qui a sonné le glas de la vieille Union européenne, les causes ne sont pas financières et économiques d’abord, contrairement à la légende que voudrait répandre la vulgate au pouvoir ; mais elles sont essentiellement culturelles, civilisationnelles, et identitaires. Et institutionnelles surtout.
Ce vote dit le refus de l’Union européenne, en tant qu’elle dénie depuis toujours le principe de subsidiarité, en tant qu’elle repose sur une coalition d’intérêts bureaucratiques, normatifs et égalitaristes dans le pire sens du terme.
En tant qu’elle est une entreprise de négation du caractère propre de chaque pays, de chaque nation, de chaque peuple.
Ce vote du petit peuple anglais, celui des yeomen, les anciens hommes libres, est aussi l’expression du refus de la domination des puissances économiques en Europe.
De cette drôle Europe qui surveille sans protéger : qui n’est jamais là où il faut, ni sur le front de l’immigration, ni dans les relations internationales, avec le Proche-Orient, avec l’Afrique, avec l’est de l’Europe et la Russie.
Nos maîtres ont brandi des arguments matérialistes : en face d’eux se dressait l’âme de l’Angleterre.
Et c’est un gigantesque bras d’honneur qui a été fait à MM. Schulz, Tusk, Verhofstadt, Draghi et à leur nouveau TINA, There is no alternative.
Le peuple anglais a montré à la face du monde qu’il n’y a rien d’écrit d’avance, rien d’inéluctable.
Dans leur idéologie, les dirigeants de l’UE croyaient que leur domination durerait toujours.
Ils en sont pour leurs frais. Aujourd’hui, ils essaient de punir le peuple anglais, de façon encore une fois scandaleux.
Comme si l’on était à l’école, prouvant ainsi que leur Europe a été bâtie contre les peuples.
Voulant soi-disant éviter la dislocation, ils tentent d’accélérer le processus de séparation avec le Royaume.
Mais c’est ainsi qu’ils risquent de produire le contraire de ce qu’ils souhaitent, et provoquer cet éclatement.
Bâtir la vraie Europe demain, celle que nous appelons de nos voeux depuis tant d’années, ce sera enfin renoncer au modèle jacobin français qui a été imposé à l’UE et aller vers un « girondisme », une confédération à la suisse, qui respecte les peuples, leurs coutumes, et la subsidiarité.
Des patries libres dans une Europe libre.
Charles Millon
Ancien ministre de la défense
Président de l’Avant-Garde
Le Brexit vu par Charles Millon
Disons-le tout net, que les Britanniques choisissent par referendum le 23 juin de quitter l’Union européenne ne produira certainement pas la catastrophe annoncée par des medias et des politiques surfant sur les peurs.
En tout cas, pas pour les sujets de la Reine.
Les craintes de la City, que l’on n’est d’ailleurs pas obligé d’écouter complaisamment, sont injustifiées : la place financière londonienne ne doit pas tant sa position prédominante à l’Europe qu’à sa longue histoire et au cadre juridico-financier anglo-saxon.
De plus, sur un plan strictement comptable, ce sont bien 11 milliards de contributions qui, malgré le rabais britannique, reviendront dans la poche de l’Etat.
Aux dirigeants du Royaume-Uni de décider ensuite comment ils répartiront ce bénéfice. Enfin, les sondages révèlent tous une fracture ouverte entre les élites gagnantes de la mondialisation et un peuple qui n’en peut plus de la destruction de ses emplois, de la concurrence des travailleurs étrangers, de l’immigration massive, de la fin de sa culture propre et des normes imposées depuis Bruxelles.
Or, jusqu’à preuve du contraire, personne ne peut reprocher à un peuple, surtout si ancien, de vouloir disposer de son propre destin.
Non, ce « Brexit » sonnerait surtout le glas de la forme européenne, bureaucratique et centralisée, que l’on a imposée au continent depuis quarante ans, comme s’il n’existait pas d’autre choix.
Ce oui au « Leave » serait une réponse, certes abrupte mais pourtant justifiée, à la disparition du principe de subsidiarité dans le fonctionnement des instances européennes, à la morgue de ses dirigeants non élus (quel Britannique a déjà rencontré MM. Juncker et Tusk ?), à un monde, enfin, conçu sur le seul modèle d’une standardisation des relations économiques, environnementales, sociétales.
Un modèle qui fait fi des particularités autant que de la raison, dans lequel chacun doit indifféremment accepter l’ouverture des marchés, la concurrence libre mais faussée, l’adhésion au multiculturalisme, le mariage gay et la PMA, les migrants par vagues gigantesques, la sous-culture hollywoodienne, enfin l’anomie générale.
Un monde où la démocratie est un fantôme, le travail une denrée rare, l’éducation une idéologie, l’argent le dernier dieu. Peut-être les Anglais y perdront-ils économiquement durant quelques années – encore que cela ne soit pas prouvé.
Du moins auront-ils fait le choix de leur destin, de leur souveraineté et de leur identité.
Et c’est à quoi l’on reconnaît les hommes libres.
Charles Millon
Ancien ministre de la défense
Président de l’Avant-Garde
Revue politique Charles numéro 17 du 5 avril 2016
Portraits Nadège Abadie
RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX
Charles MILLON
C’est amusant, vous avez été ministre de la Défense alors que vous avez été exempté du service militaire.
Comment êtes-vous devenu ministre de la Défense. Etiez-vous spécialiste de ces questions ?
Comment s’est passée cette fin du service militaire ? Comme une lettre à la poste ?
Ce n’est pas très noble mais je me rappelle avoir voté pour Mitterrand en 1981 parce qu’il promettait de mettre fin au service militaire que je n’avais, à dire vrai, pas le cœur de faire. En revanche, je n’ai pas souvenir que Chirac en ait, de son coté, fait une promesse de campagne.
Mais pourquoi l’avoir appelé le Cercle Charles Péguy ?
Est-ce qu’à ce moment-là, vous envisagiez déjà une carrière politique ?
Vos parents faisaient de la politique ?
Et c’est dans ce cercle Péguy que vous rencontrez votre femme…
Oui, c’est ce que Sarkozy a fait !
Vous n’étiez pas donc comme ceux qui allaient devenir plus tard vos amis- je pense par exemple à Alain Madelin qui, vers 68, faisait partie du groupuscule d’extrême droite Occident-, dans la bagarre ?
Centriste, ça vous va ?
Giscardien ?
Pourquoi ?
Quand en 1995, vous soutenez Chirac, Giscard était d’accord ?
Quels étaient vos rapports avec Alain Juppé lorsque vous étiez ministre de la Défense et lui Premier ministre ?
Et aujourd’hui, vous avez de bons rapports avec Alain Juppé ?
Souhaiteriez-vous qu’il gagne la primaire ?
Vous parliez de fédéralisme tout à l’heure. Pourtant, à cette époque, on était à droite, plus étatiste que fédéraliste.
Vous étiez très minoritaires en ce temps-là ?
Vous êtes pour un Europe fédéraliste, donc ?
On en arrive aux élections régionales de 1998 où vous faites alliance avec le Front national.
Mais en 1992, vous disiez le contraire.
Est-ce que cette histoire vous a blessé ?
Vous venez de fonder un think tank avec Charles Beigbeder. De quoi s’agit-il exactement ?
Le mariage homosexuel a été une blessure pour vous ?
Pour finir, que pensez-vous du pape François ?
Le piège de la Turquie par Charles Millon
Une nouvelle fois, l’Europe se sera couchée devant les menaces de l’un de ses voisins.
En l’occurrence il s’agit de la Turquie de M. Erdogan, personnage arrogant, si prêt à tout qu’il n’a pas hésité, on s’en souvient, à abattre un avion russe il y a quelques mois, prenant le risque d’une escalade militaire extrêmement dangereuse.
Dans le petit jeu des hommes forts face aux démocraties paralysées, le président turc ne le cède en rien au président russe : qui en Ukraine et en Géorgie, qui à Chypre et en Syrie, les deux chefs d’Etat ont les mêmes ambitions impérialistes.
Mais aujourd’hui, à la faveur de la crise des migrants, c’est Erdogan qui nous dame le pion.
Dans l’accord conclu le 18 mars avec l’Union Européenne, accord négocié par Angela Merkel qui se comporte comme la véritable présidente de l’Europe, la France étant portée disparue, le président turc ne lâche rien et obtient tout.
Dans l’ordre : 6 milliards d’euros sur deux ans ; la « réinstallation » de 72 000 réfugiés syriens sur le sol européen ; l’exemption, à court terme, de visa pour les Turcs voyageant en Europe ; enfin, l’ouverture de nouveaux chapitres d’adhésion à l’UE.
En échange, la Turquie n’accomplira que son devoir de base : empêcher les migrants de se rendre illégalement en Grèce par la mer Egée. En gros, ce que fait la France à Calais.
Ce fut en vérité un sommet de la honte, qui est venu annihiler toutes les belles paroles précédentes de l’Europe donneuse de leçons.
Car si l’on retourne un peu en arrière, au moment des « printemps arabes », l’Europe a commencé par annoncer qu’elle allait débarrasser le monde des dictateurs, en faisant tomber Kadhafi, en prenant le parti de la rébellion contre Assad.
Puis, devant la déferlante de réfugiés, demandeurs d’asile ou migrants, elle a clamé qu’elle les recevrait tous.
Ensuite, elle a proposé de mettre au piquet tous les gouvernements rétifs qui comme ceux de Hongrie ou de Pologne refusaient d’appliquer les quotas de répartition des migrants élaborés par l’Allemagne et imposés par l’Europe.
Et maintenant, dans une palinodie digne de Daladier, elle sacrifie toutes ses valeurs sur l’autel d’une politique de dernier recours, sous-traitant à des pays comme la Turquie la gestion des réfugiés.
Des pays qui non seulement ne respectent pas les droits de l’homme mais encore nous font payer très cher leur collaboration.
L’Union Européenne, en marchandant avec la Turquie afin d’endiguer le flot des réfugiés, laisse Erdogan piétiner les droits de l’Homme, le respect des minorités et la liberté d’informer.
Pire, l’Union Européenne envoie un message de « désespoir » à ces populations qui fuient la guerre, les massacres et l’absence d’avenir pour leurs enfants.
A réfléchir à très court-terme, pour vouloir la paix et une bonne conscience, nous avons récolté la guerre et le déshonneur.
Charles Millon
Ancien ministre de la défense
Charles Millon: « les partis ·politiques sont maintenant des ·machines électorales »
Video : Le clivage droite-gauche est-il toujours opérant ?
Le clivage droite-gauche est-il toujours opérant ?
– Charles Millon ( Ancien ministre de la défense, ancien président de la région Rhône-Alpes et président de l’Avant-Garde )
– Karim Ouchikh (Président du SIEL)
– Jean-Frédéric Poisson (Député des Yvelines et président du PCD) – Xavier Lemoine (Maire de Montfermeil)
– Guillaume de Prémare (Délégué général d’ICHTUS)
Les conférences de l’Avant Garde
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Combattre vraiment Daech
Voilà plus d’un an que Daech a proclamé le Califat ; voilà plus d’un an qu’une coalition internationale, sous la houlette des Etats‐Unis, bombarde la région. Avec quel succès ?
Pour l’instant, la paix s’éloigne un peu plus chaque jour.
Viols, esclavage, mutilation, destructions de monuments sans prix, déplacement de population, brimades, mise en scène de torture : on pourra dire que l’Etat islamique se sera donné du mal pour être à la hauteur de son rôle de « monstre absolu », renvoyant au deuxième rang les Shebabs, les GIA, les talibans et al Qaeda.
Daech donc occupe aujourd’hui un vaste territoire, à cheval sur au moins deux pays, l’Irak et la Syrie, et le monde assiste, presque impuissant, à ses exactions et à l’extension de son domaine de nuisance.
Aussi la question se pose aujourd’hui, plus que jamais : qu’attendons‐ nous pour agir vraiment ?
Attendons‐nous que ces pays se soient définitivement vidés de leurs populations chrétienne, yézidie, ismaélienne, alévie, alaouite et même chiite ?
Attendons‐nous que ne demeure plus que le sunnisme à front de taureau, sous sa forme la plus bornée, avec ses femmes sous tente portative, ses interdits odieux et sans limite, sa haine du reste du monde ?
Attendons‐nous que l’Irak et que la Syrie tombent entièrement entre leurs mains, au prétexte qu’il ne faudrait pas traiter avec le tyran Assad, ni avec les méchants iraniens, ni avec le Hezbollah, ni même avec Poutine ?
Préférons‐nous fermer les yeux sur les sempiternelles attaques turques contre les Kurdes ? Ou sur les bombardements inhumains du Yémen par nos alliés saoudiens et consort ?
Personne ne fait la guerre de gaieté de cœur, sauf les imbéciles. Sauf peut‐être ceux qui décident un beau jour de faire tomber un dictateur sans prendre garde aux suites mortelles, pour l’Europe elle‐même, de leur mini‐guerre sans risque.
Mais aujourd’hui, il s’agit de prendre des risques, et certainement pas inutiles, car il en va peut‐être de notre survie, mais certainement de celle d’antiques civilisations et communautés du Proche‐Orient.
La France a déjà envoyé ses hommes, seuls, au Mali et en Centrafrique. Ils y sont toujours et sont sans doute les derniers gardiens de la dernière porte avant le chaos en Afrique de l’ouest.
Mais ce qui se joue entre la Méditerranée et l’Euphrate est, comme mille fois auparavant dans l’histoire des hommes, déterminant pour la physionomie du monde dans les décennies qui viennent.
L’Etat islamique est un problème géopolitique, un cancer qui se répand en Libye, en Somalie, au Sinaï, qui passe des accords avec Boko Haram ou les talibans.
Mais c’est plus généralement un monstre dont la barbarie est sans limite. Une sorte, disons‐le, de totalitarisme vert, qui ne le cède en rien aux deux totalitarismes du XXème siècle.
Né de l’islam, il est conduit maintenant par une idéologie autonome qui fait redouter le pire.
Comme l’a remarqué Renaud Girard dans les pages du Figaro, on ne peut prendre le risque de répéter notre faiblesse des années 30 face à la montée du nazisme. C’est maintenant qu’il faut agir, avant qu’il ne soit trop tard.
En ce sens, il faut que la France en tant que membre permanent du Conseil de sécurité obtienne une résolution de l’ONU autorisant une intervention au sol à fin de mettre un terme à ces crimes contre l’humanité.
La France doit prendre l’initiative de réunir une conférence internationale dont l’objet sera la constitution d’une vraie coalition, non plus seulement aérienne, mais appuyée sur une force d’intervention.
Il faut réunir les nations alliées : celles qui sont prêtes à intervenir militairement, celles qui apporteront leur soutien, et celles qui participeront au financement.
L’objectif premier étant de permettre à ces pays, Irak et Syrie d’abord, de recouvrer leur souveraineté et d’empêcher la poursuite de ces crimes, qui dépassent le seul cadre de la guerre et s’apparentent de plus en plus à des crimes contre l’humanité.
Cette conférence internationale devra aussi déterminer le type d’accompagnement qu’il faudra prodiguer à ces pays par la suite pour empêcher qu’ils ne retombent dans l’anarchie et la misère.
L’Europe, fidèle à son histoire, s’honorerait de prendre la responsabilité de ces opérations de reconstruction et d’accompagnement.
Le temps n’est plus aux lamentations devant les horreurs perpétrées par Daech.
Le temps est à l’action déterminée pour garantir la Dignité des personnes, le droit des minorités et le respect des croyances dans cette région du monde où notre civilisation a ses racines.
Le Figaro du 8/09/2015
Charles MILLON
Ancien Ministre de la Défense Président de l’Avant‐Garde